Une âme en perdition...

Paisiblement, le Roi Lion aux yeux d'argents contemplait le feu qui lui faisait face. Vêtu de haillons, l'homme ne bougeait point, la neige tombant lentement au fur et à mesure autour de lui, alors que le feu qu'il avait généré constituait la seule source de chaleur dans les environs. Pourtant, il avait la affaire à une solitude qui lui plaisait.
levant le regard un instant pour contempler l'immensité blanche l'entourant, Rigald se dit que sa présence ici n'était peut-être plus nécessaire. Priscilla morte, l'armée d'Isley anéantis, Isley lui-même mort et lui... plus mort que vif, les dernières actions d'éclats des sorcières aux yeux d'argents avait de quoi réduire les dernières activités possible de l'éveillé. La Villa Duci réduite en ruine, same pour l'organisation, et Chidori disparue, il avait de surcroît perdu ce qui pouvait encore le rattacher à Livia. Et sa vengeance, jamais l'ancien numéro deux n'aurait pu prévoir le déroulement des événements. Non seulement celle-ci fut accompli, mais de la main même de celle qu'il redoutait.
De fait, il avait beau regarder autour de lui, vagabonder, il ne voyait point de raison d'exister... oh, l'amour de la vie, et la faim agissait toujours et le faisait se mouvoir, certes, mais jamais le Roi des félins n'aurait pu imaginer un jour se retrouver aussi démuni.
On lui aurait annoncé cela quelques mois auparavant, il aurait rit au nez de l'impudent.

... Que faire?

En soupirant, son regard se baissa, alors que la main blanche du jeune homme se tendit pour remuer un peu les branches. Le manteau qui le recouvrait, lui et ses vêtements, était de piètre qualité et semblait ne jamais avoir été lavé. Quand aux vêtements en eux-même, seul la conscience personnel de Rigald lui faisait les entretenir, les rendant de visu d'assez belle facture. Toutefois, force était de constater que le corps de l'exalté ne bougeait point, et celui-ci se contentait de se perdre dans les flammes qui lui faisait face.
Non seulement il avait tout perdu, mais de plus, il n'avait plus à combattre. Tout les ennemis potentiels étaient morts, et cet île n'avait, semble-t-il, plus de soucis à ce faire.
Au pire, songea-t-il, les claymores régleraient lesdit soucis. celles-ci s’apprêtaient à traquer tout les exaltés. Alors Rigald se contentait de patienter, calmement, la venue de ces dernières. Il avait beau manquer singulièrement de motivation, ce n'était point un ennemi à sous-estimé, surtout qu'il avait eu la chance de survivre à la monstrueuse détentrice de la force de Theresa la Souriante. Celle-ci ne l'avait point affronté durant la Guerre du Nord, l'assaut du Roi Lion ayant été trop violente, mais à présent qu'il savait qu'elle avait abattu Priscilla, ce n'était pas plus mal qu'il ne l'ai point rencontre.
A présent, seul la pulsion du combat, l'excitation de l'hémoglobine et le plaisir de l'action le faisait vivre.

Mais Rigald ne cessait de penser aux trois personnes n'ayant jamais régit son existence... Isley, l'homme le plus proche que le Roi Lion pouvait qualifier d'ami -c'était du moins le sentiment ressenti à présent qu'il l'avait perdu, même si l'avouer lui arracherait la gorge... en plus douloureux-, Milena, celle qui lui avait apprit la liberté, et Livia, son amour...
Si il a veillé sur Chidori, c'était pour reporter sur cette enfant l'affection que l'homme ne pouvait porter sur un éventuel enfant. Et même, après sa mort, sur sa compagne.
C'était un fait. Et à présent, tout cela lui pesait. De fait, si il périssait, il pourrait peut-être la revoir? les humains pensaient à une vie après la mort après tout...
S'immobilisant, en entendant un son, il finit par soupirer. Il n'avait même pas envie de se retourner ou de se protéger. cela n'en valait point la peine... Un soupir fut donc sa première réaction, avant de prendre la parole.

Cédons aux bonnes manières... qui que vous soyez, désirez-vous partager mon feu?

J'ai aussi un peu de viande seché dans mon sac, servez-vous si vous voulez...

dit-il en envoyant un petit sac sur le côté avec négligence. Tout, en lui, semblait fatiguer. Pour la première fois depuis son existence, l'ancien numéro deux ressentait le poids de l'âge...

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Piéta, un jour plus tôt...

La grande salle était baignée dans la douce clarté rougeoyante du foyer. Les flammes donnait un peu de chaleur, mais la pièce était bien trop vaste pour pouvoir être réchauffée par un feu. Peu importe pour l'occupant du lieu, il ne souffrait pas du froid, il y était habitué, il l'aimait. Se tenant d'une main au dessus de l’âtre, le seigneur aux cheveux argentés, semblait regarder au-delà, pensif et faisant à peine cas de la femme qui entrait. Celle-ci n'avait même pas frappé avant d'entrer. Elle s'avançait, élégamment vêtue d'une longue robe d'un bleu roi, bordée de fourrures d'hermine. Elle s'arrêta à quelques mètres de l'homme, silencieuse, les mains l'une dans l'autre devant elle. Isley regarda par dessus son épaule et sans dire le moindre mot, se rendit à son bureau où la femme le rejoignit. Il ouvrit un tiroir et en sortit une carte qu'il étala puis cala pour qu'elle reste ouverte correctement. Se penchant au-dessus, il fit signe de la main à son interlocutrice afin qu'elle s'approche pour mieux voir :

- Nous avons encore plusieurs foyers de parasites à nettoyer. Il semblerait qu'à Roct, des hommes suspects se soient présentés au prévôt, afin de réclamer une vieille dette. Or, ils seraient de Strah. C'est la troisième fois ce mois-ci. Selon Marc, il s'agit réellement d'un citoyen humain, cela dit, j'ai des doutes sur l'anéantissement de l'Organisation. Elle a été affaibli, certes, mais elle s'est déjà relevée de bien pire auparavant. Tu vas donc te rendre à Strah et enquêter sur leur lien avec les hommes en noir. Évites Hélios par contre, je ne veux pas qu'il sache que nous enquêtions sur ses anciens partenaires.

- Je vois... fit la femme en soupirant. Vous m'envoyez en zone noire mon seigneur. Vous aurais-je déplu?

Isley eut un haussement de sourcils interrogateurs en réponse à la question de la femme. Cette dernière affichait un sourire doux et paisible, quasi-énigmatique. Un instant, il la regarda, la trouvant vraiment très belle ainsi. Elle avait quelque chose de royal, de serein et de noble dans sa manière d'être. L'homme lui était redevable, et c'était justement cela qui l'avait empêché d'aller vers plus d'intimité avec la belle créature. Depuis que Livia l'avait sortit des griffes des dévoreurs d'abyssaux, ils avaient marché ensemble dans la même direction. Elle l'avait soutenu et lui avait permis de recouvrir la majorité de ses forces. Aujourd'hui, il lui restait encore de l'énergie à récupérer, cela dit, il n'était plus l'homme fragile qu'elle avait réussit à sauver in-extrémiste de la mort et de l'oubli. Le sourire habituel de l'abyssal s'esquissa :

- Bien au contraire, c'est parce que je te fais confiance plus qu'à quiconque. Tu sauras passer inaperçue et trouver ce que je souhaite. Eh puis... je suis sûre que tu reviendras.

Livia fit une révérence. Sa tête inclinée, laissa s'échapper ses longs cheveux dorés et voluptueux devant elle, laissant s’exhaler une douce odeur de fleurs blanches.

- Il sera fait selon vos ordres mon seigneur.

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Livia avait quitté ses belles tenues d'Ailin pour une tenue de combattante. Elle portait une tenue de cuir sombre, ainsi qu'une large et épaisse cape grise. Sa claymore était dans un fourreau, conçu pour la dissimuler. Elle prit une monture légère, emporta quelques affaires personnelles et quitta Piéta. Elle s'engagea tout d'abord sur la voie principale qui menait au passage vers l'Est, puis, se ravisa en cours de route. Alors qu'elle prenait une halte dans une auberge, elle entendit quelques rumeurs étranges entre les voyageurs :

- Y a un type qui traîne dans les ruines...

- sûrement l'un des monstres qui est poursuivit par ses satanées bonnes femmes!

- Ou un sans domicile peut-être?!

- Un bandit plutôt!

- Barf! Qu'est-ce qu'il foutrait là tout seul! C'est un yoma plus con que les autres et puis voilà!

- Arrêtons avec c'te histoire! Payes ta tournée l'ami! Ce sera plus intéressant! On s'en fout des fantômes des guerres nordiques, maintenant c'est la paix grâce au seigneur Ailin!

- À la santé d'Isley d'Alphonse!

Livia trinqua en même temps que les hommes. Puis paya et s'éclipsa discrètement de l'auberge. Prenant sa monture, elle se dirigea vers l'une de ces fameuses ruines qu'avaient justement créé Isley lors de sa bataille contre l'Organisation. Cela, les humains l'ignoraient, mais pas elle. Il était probable que l'un des leurs et non un yomas y soient. Un guerrier perdu et en quête de sens certainement... Le roi du nord avait rallié bon nombre d'exaltés sous sa bannière et avait mis au point un système ingénieux pour nourrir ses compagnons sans que les habitants en soient alertés. La furtive se rendit donc aux fameuses ruines de la légende urbaine naissante. Assez rapidement, elle sentit un yoki puissant mais surtout, connu. Une nostalgie se saisit de son cœur tandis qu'elle attachait son cheval à un arbre. Les restes de l'ancien village était niché en hauteur, elle monta la côté doucement, se laissant aller à ses sensations, se laissant guider par cette énergie qui semblait s'éteindre, fascinante, empreinte de tristesse et comme désabusée. La femme ne cessait de s'étonner de tout ce qui pouvait se lire dans le yoki d'un être qui en possédait.

L'exaltée finit par arrivée dans les ruines. Elle y entra, attentive. Dissimulée sous sa lourde cape. Assez vite, sa petite excursion la mena au cœur de ce qui fut le village, et en son centre palpitait un feu de camp devant lequel un homme se tenait. Livia s'avança pour mieux le distinguer et fut soudain interdite : pouvait-il vraiment s'agir de lui? La tenue que portait l'inconnu était négligé, mais surtout, le comportement qu'affichait cet individu ne collait pas avec le caractère flamboyant de celui qu'elle gardait en mémoire au plus profond d'elle-même. Sans vraiment faire attention, la dame marcha sur une brindille qui craqua, l'homme soupira comme fatigué et lança alors un sac de vivres :

- Cédons aux bonnes manières... qui que vous soyez, désirez-vous partager mon feu? J'ai aussi un peu de viande séchée dans mon sac, servez-vous si vous voulez...

Livia haussa les sourcils puis sourit. Sans décrocher un mot elle ramassa le sac et le porta tout en marchant vers le feu. Toujours cachée par sa capuche, elle posa la sacoche et vint poser sa main sur l'épaule de celui qui lui avait offert cette modeste hospitalité :

- Tu es à peine reconnaissable Rigald.

Pensant avoir l'attention de l'homme, la femme retira se qui lui dissimulait le visage, laissant ses cheveux s'écouler le long de ses épaules et de son buste. Elle se pencha et s'assit pris de lui, doucement, puis inclina la tête sur le côté en souriant :

- Bon retour à la maison, Chéri.

Il était amusant de constater les capacités perceptives du corps par rapport à l'esprit. Avant même que la nouvelle venue ne se fasse connaitre, Rigald sentit que quelque chose n'allait pas. C'était comme si son corps tout entier, soumis tout d'un coup à un stress intense ou à une réaction prémonitoire, commençait à chauffer. Oh, il ne suait pas, et sa température corporelle n'avait point changer. Mais, étrangement, l'homme ressentait ses tripes se nouer et sa chaleur corporelle croître. Un fait étrange, alors que une odeur perceptible se fit connaitre. Si cette odeur lui était connu, cela devait faire tant de temps qu'il ne l'avait sentit que son esprit l'avait perdu. En revanche, son corps, lui, semblait s'en souvenir à merveille, car le coeur du Roi Lion aux Yeux d'argent se mit à battre plus fort. Un fait des plus étranges, tandis que son esprit, lui, se méprenait; Etait-ce la les prémices d'un futur combat? est-ce que son corps réagissait comme cela à un futur danger? à un danger que même lui trouvait concevable? c'était, sous bien des aspects, une façon de voir des choses juste.
Le plus amusant était que sa tristesse semblait avoir disparut temporairement. Son intérêt avait été attrapé par l'odeur, et ne semblait pas vouloir s'en détacher, le faisant se redresser un minimum.
Ensuite vint la main sur l'épaule. Soyons franc: si Rigald n'avait pas été aussi récepctif, il se serait redressé pour décapiter le malheureux par pur réflexe. Pourtant, là, son corps ne réagit pas. La force exercée par cette main n'était point élevée, mais pourtant, elle le clouait au sol avec la puissance d'un étau gravitationnel au plus haut degré. Le corps de Rigald était tendu au maximum, mais ce n'était pas, pour une fois, à cause du danger, non. C'était plus une réaction physiologique naturelle que l'esprit de l'ancien numéro deux ne parvenait à expliquer.

Et enfin, vint la voix. Celle-ci résonna aux oreilles sensible du lion, amplifiée à l'infini par la conscience de celui-ci. cette voix, une seule personne en avait une semblable. une personne sensée être morte. Pourtant, son coeur battait la chamade, et le sang qui ruisselait en lui bouillonnait comme au premier jour. C'était la première fois depuis longtemps, très longtemps, qu'il ressentait son sang ainsi en ébullition hors d'un combat. Son esprit qualifiait cela d'impossible, mais son corps clamait le contraire. La réalité qui l'entourait le regardait en lui faisant un gros doigt, brisant tout ceux en quoi il avait cru.
La surprise n'avait même pas sa place ici. La stupéfaction, en revanche, emplissait l'homme, qui se tourna lentement, doucement, vers la nouvelle venue. Son visage n'était pas ce que l'on pourrait qualifier de surpris ou de terrifié, non. Et manquait singulièrement de classe.
Il avait les yeux sortant des orbites, tout simplement.

Im... po... ssible.

Bon retour à la maison, Chéri.

En un instant, une vague de sentiments et de souvenirs envahis Rigald. Rigald, le Roi Lion aux Yeux d'Argent, ne pouvait que verser des larmes. L'ancien numéro deux de la première génération, puissant et craint par tous, ne pouvait que sentir des larmes couler de ses joues devant ce spectacle. Son esprit suggérait qu'elle soit fausse, qu'elle ne soit qu'une illusion générée par son esprit, que sa présence n'était pas logique.
Mais son odeur était la sienne. sa voie le caressait comme du velours, le réchauffant, et con coeur et son âme. Sa joie, celle qui emplit son corps entier d'une manière incontrôlable, était réelle. Ses yeux, ce sourire, ces lèvres, cette chevelure... et, surtout, cette capacité à éveiller en lui des souvenirs aussi vieux et puissant ne pouvaient être falsifier.
Pourtant, elle était sensé ne pas pouvoir se trouver là.
La main tremblante, l'homme lacha le bout de bois qu'il tenait et tendit celle-ci vers la jeune femme en tremblant.

mais... tu étais sensées être morte... je t'ai senti...

Mourir? ce mot n'était pas d'actualité, ce mot n'avait pas lieu d'être. ce mot honni auparavant était désormais espoir. Et sa main cessa bientôt de trembler quand il effleura les cheveux de la demoiselle. Rien que cet effleurement l'emplit d'une paix fabuleuse, dépassant tout ce que Rigald avait pu connaitre. Le toucher, qui lui prouvait qu'elle était réelle. Et qu'elle ne disparaîtrait pas.
Bon retour à la maison, chéri...
Ses mots firent tout taire. Ses doutes, ses inquiétudes, ses questions, sa haine envers le monde, ses désirs de meurtre, son attirance vers la mort, tout s'estompa.
Seul ne restait que la femme, tranquillement assise à côté de lui, qui semblait le saluer comme si ils s'étaient vu hier. Et, enfin, après de longues minutes, le nom fatidique échappa ses lèvres.
Exalté... ce terme n'avait jamais eu autant de sens.

Livia, tu... je n'ai jamais été aussi heureux de m'être trompé! je...
...

Je suis rentré, mon aimée. Enfin...

Une seule envie le saisit: l'étreigner là, maintenant: la serrer dans ses bras, fort contre lui, la sentir vivante, réelle, dans l'ensemble. Elle lui avait tellement manqué que cela en devenait une torture intense, comme si tant de temps dans la déception avait accumulé son désir... non, même pas désir au fond. Juste l'envie de la sentir, tout simplement.
Le plus drôle, en temps normale, il aurait commenté que, n'étant pas marié, le chéri n'était pas de mise. La, l'idée pouvait aller se faire niquer en profondeur par un éléphant.

Im... po... ssible.

Bon retour à la maison, Chéri.

La jeune femme s'était penchée pour être mieux vue de l'homme, autant que pour mieux le voir. Elle voulait tellement reconnaître celui qu'elle avait laissé tout ce temps. L'allure générale qu'il affichait tenait de l'individu à la dérive que du seigneur de guerre et fin stratège qu'elle avait aimé jadis. Depuis combien de temps errait-il et pourquoi ne l'avaient-ils pas retrouvé depuis le temps ? Quand elle avait dû s'occuper de l'abyssal, ils durent s'exiler un temps, afin de permettre à l'homme de retrouver des forces dignes de ce nom. Durant cette période, ils étaient restés seuls, partageant leur quotidien, s’entraînant mutuellement. Lorsque le Roi d'argent s'estima suffisamment en forme pour retourner aux affaires, ils sortirent de leur autarcie et quittèrent leur repère de l'Est pour le Nord. Les plan de l'abyssal n'était plus les mêmes alors. Libéré de Priscilla et connaissant les enjeux qui attendaient l'ensemble de l'île, le descendant des prestigieux Ailin s'en retourna vers ses terres et les reprit en main, en tant qu'humain. Livia le seconda, passant pour une cousine, et tout deux regroupèrent des troupes tout en débarrassant le territoire des yomas et en relançant la reconstruction de la région. De Raki, Isley retrouva son humanité, d'Isley, Livia retrouva la sienne.

La femme qui se tenait près de Rigald était enfin entière et apaisée. Les conflits internes qui la broyaient lors de son éveil ne la torturait plus. Elle savait concilier sa nature humaine et démoniaque sans prendre l'une ou l'autre comme un handicape. L'être qu'elle était versa des larmes en réponse de celles qui lui étaient offertes. Mais un sourire tendre, plein d'amour et de compréhension, venaient éclaircir le sens de ses pleurs. Elle était heureuse de le retrouver, de le savoir en vie alors qu'une chasse sans merci était ouverte par les claymores contre les éveillés. La main tremblante de l'homme lâcha le bout de bois qu'il tenait et tendit celle-ci vers la jeune femme :

mais... tu étais sensées être morte... je t'ai senti...

Livia laissa Rigald finir son geste. Il avait besoin de la toucher, de vérifier qu'il ne s'agissait pas d'un leurre, d'un souvenir ou d'un début de folie. Et sa main cessa de trembler quand il effleura ses cheveux dorés. D'un mouvement léger, la furtive essuya ses larmes avec la paume de sa main, se contentant de regarder le guerrier qui demeurait interdit et songeur. Chacun devait se remettre de cela. Le vent soufflait, froid et dru, charriant de la neige et menaçant le feu. Mais peu importe, ce foyer n'était que symbolique, la relique d'un passé humain où l'on se réunissait autour de la flamme pour partager. Après de longues minutes, Rigald finit par se reprendre et dire simplement :

Livia, tu... je n'ai jamais été aussi heureux de m'être trompé! je... … Je suis rentré, mon aimée. Enfin...

La femme saisit la main de l'homme et y posa un baiser léger, éphémère et chaste, avant de la poser sur sa joue tiède et encore légèrement mouillée par l'émotion. Tranquillement, elle enleva ses gants qu'elle posa près du feu, et s'agenouilla devant Rigald, un sourire affectueux aux lèvres. Ses mains chaudes vinrent se poser sur le visage de son ancien amant, tandis qu'elle rapprochait son front du sien, les faisant se toucher. Leur souffles se mêlèrent dans la fraîcheur hivernale, tandis que les lèvres de la femme articulèrent quelques brides d'explication :

Nous avons beaucoup de choses à rattraper... mais... je vais devoir à nouveau te quitter...

Livia se décala de lui, afin qu'il puisse la voir, qu'il puisse comprendre à l'expression de son visage, que cette décision lui pesait énormément et qu'elle ne le rejetait pas. Elle devait remplir sa mission, Isley ne l'avait pas envoyé si loin pour une promenade de santé, il avait besoin d'informations précises sur ce groupe qui utilisaient Stah comme intermédiaire.

Je dois me rendre à Strah, dans l'Est. Isley te racontera tout si tu le rejoins à Piéta, dans la demeure des Ailins. Si tu restes avec moi, nous risquerions de devenir des proies faciles et je ne veux pas te perdre une seconde fois. Je ne puis t'offrir que quelques heures avant de reprendre la route... mais je te promets de rattraper le temps perdu dès mon retour de mission.

Machinalement, Livia prit un mèche de cheveux de Rigald et la fit glisser sur le côté, pour mieux le voir. Comment prendrait-il cela ? Comment prendrait-il le fait qu'Isley était toujours en vie ? Tant de questions devaient fuser dans l'esprit si vif du Roi lion aux yeux d'argent... Malheureusement, la femme manquait de temps pour tout cela.

Bien qu'il aurait du être le premier à comprendre, la première pensée qui traversa l'esprit de Rigald quand elle lui annonça son départ prochain fut un profond dépit... et un refus catégorique de la laisser partir!! surtout que, comme elle le soulignait si bien, le couple avait du temps à rattraper. Elle ne se privait d'ailleurs pas de le lui rappeler, en prenant sa tête entre ses mains si douce pour l'embrasser... Depuis combien d'année n'avait-il point ressentit se contact à la fois doux et amer au niveau des lèvres? cette humidité, ce cœur rougeoyant au niveau du visage qui semblait prendre vie au contact de son propre corps. Et oui, il était totalement opposé au nouveau départ de la jeune femme. Il fallait le comprendre, aussi. A peine il la récupérait que un nouvel acte la mettait en danger. Et à nouveau, il devrait reporter à plus tart tout ce qu'il n'avait pu dire, faire et accomplir pendant tant d'année que le monde en avait changé. La tempête avait emporté le monde, mais les amants avaient survécu. Le temps passé séparément n'avait fait qu'accroître les sentiments du Roi Lion aux Yeux d'Argents, qui s'était sentit se vider au fur et à mesure. Et ne l'aurait-elle point appeler chéri qu'il aurait douter des sentiments qu'elle entretenait encore à son égard.

les paroles de Lennëa lors de leur séparation le hantait encore. Elle l'avait accusé d'avoir tué Livia, de lui avoir imposé une vie qu'elle ne voulait pas, et qu'elle n'avait pas résisté... l'ancien numéro deux avait finit par y croire, alors la voir, en face de lui, lui souriant avec une affection non feinte, c'était comme... une libération. Un poids énorme se dégageant de ses épaules, convaincu à présent qu'il n'était point responsable. Que ce n'était pas lui qui avait causé la fin de celle qu'il aimait.

Pourtant, ces si précieuses retrouvailles allait se révéler bien courte. En effet, isley lui avait apparemment confié une mission de... attendez.
La perplexité se lut clairement sur son visage. Isley? N'était-il pas sensé être mort? et apparemment Livia et lui avait continué ensemble, hein...
En songeant que les autres abyssaux avaient, du coup, peut-être survécu également, l'homme s'assombrit légèrement. Il avait monté de quoi abattre Riful. Son plan, à présent, n'avait plus d'être: donner la force à l'abyssal de s'opposer au Roi du Nord, et préparer la confrontation avec... Priscilla. Il était le seul, à l'époque, avec Isley, à savoir à quel point cette chose était monstrueuse. Et Riful abattue, Luciela aurait été une formalité. Toute la difficulté résidait dans la confiance de l'abyssale afin de l'amener droit à la confrontation. Et il avait échoué... même si, au final, un humain avait été amené à l'accomplir. Par ailleurs, l'amener dans le nord l'aurait mit en position de faiblesse, Rigald y aurait veillé. Et au pire, Isley face à elle et lui face à Duff, avec Shimeiron dans le coin et l'armée qui occupait celle de l'abyssale, les chances de réussites aurait été... plutôt grande. Mais si Isley avait su, il n'aurait pas réagit comme espéré.
Et au final, l'Organisation avait tout réduit à néant avant d'être réduit à néant à son tour.

Mais à présent, le Roi Lion aux Yeux d'argents avait une lueur dans les yeux des plus prometteuses. La lueur d'un homme qui savait désormais où aller. Et quand on savait qui il était, le pire était à craindre pour celui qui serait sur son chemin... un sourire légèrement carnassier apparut sur son visage, alors que, purgé de sa tristesse des idées, des plans et des désirs s'éveillaient en lui et fourmillait dans sa tête. Et Livia pouvait à présent admirer des yeux brillants, digne de ce nom. L’excitation pour les événements à venir avait même fait apparaître sa pupille verticale. D'ailleurs, à propos d’excitation...
Avec une vivacité qu'il pensait avoir perdu, l'ancien numéro deux ne laissa guère le loisir à la jeune femme de s'éloigner plus, et l'enlaça de ses bras puissants. Quoique plus petit de taille que la jeune femme, sa puissance physique supérieur -et à l'action surprise- serra le plus fort possible la jeune femme contre lui, l'embrassant avec une fougue qui manifestait à la perfection à quel point la femme lui avait manquait. En fait, la seule chose qui l'empêchait la, maintenant, de l’amener vers le sol et de rattraper le temps perdu affectueusement (ils auraient tout le temps de parler après), c'était... et bien, l'avis de Livia. A elle de décider, lui se contenterait de flancher. Après tout, il lui avait imposer sa présence à ses côtés et son exaltation, alors pour leur retrouvaille, elle pouvait bien la laisser décider, vu qu'apparemment elle trouvait ne pas avoir le temps.Même si, sincèrement, Isley pourrait attendre... quoique
lui non plut ne devait pas avoir que son bras droit avait survécu. Il avait disparut si longtemps du monde exalté et claymorien, après tout... avec tout ce qui s'était passé, rien de surprenant à le juger déchu. Et avec tout ce qui s'était passé, il avait du avoir bien des chiots à fouetter...

Il semblerait que je doive revenir vers le Roi d'Argent... Mais sincèrement, t'accompagner me tenterais bien. Mais soit. Profite de ce que j'espère être ta dernière mission en solo alors...

Parce que je ne compte pas te laisser de nouveau. Bon, la je n'ai pas trop le choix, mais...
je vais en profiter de revoir Isley je suppose... cela fait combien? quinze ans?

termina-t-il en plongeant son visage dans les cheveux, humant avec délice l'odeur de la jeune femme. Même si savoir qu'elle lui laissait plusieurs heures le rendait presque désireux de tenter le coup... il se contenta de la serrer fort contre lui, songeant -d'un réflexe purement animal- qu'elle était A LUI!!

Strah... Prend garde aux claymores. Elles traquent tout les exaltés. Si nécessaire, n'hésite pas à fuir, d'accord? ta vie est la chose la plus précieuse qui soit....

et morte, tu ne servirais pas Isley. Sans compter que je ne suis point sûr de survivre une deuxième fois à ta perte...

J'ai de plus en plus envie de t'accompagner quand même. Mais bon... c'est ton choix. Tu es libre, ne l'oublie jamais.

Livia revit dans les yeux de Rigald, cette flamme qu'elle lui avait toujours connu. Cette détermination si forte que rien ne pouvait la faire fléchir. À chaque moment qu'ils connurent et qui marquèrent leur vie, à chacun d'eux, ils avaient eu cet éclat : quand il l'embrassa pour la première, la prise, l'éveilla... En quelques minutes, il avait reconquérir ce qu'il fut et serait toujours : le Roi Lion aux Yeux d'argents. Le sourire carnassier de son beau mâle vînt effacé toute la lassitude que la femme avait craint en le voyant au tout début.

L'homme se saisit d'elle avec plus de vigueur et de fermeté, la collant contre lui. Livia reçut alors un baiser passionné et passionnant, auquel elle répondit avec une ferveur toute particulière. Le désir qu'elle avait eu de lui s'était endormi durant plusieurs années mais ne s'était pas éteint pour autant. La femme rendit son étreinte à son amant tout en lui lâchant des "je t'aime", "tu m'as manqué", je ne te quitterai plus" au coin de l'oreille avant de se précipiter à nouveau à ses lèvres pour les dévorer avidement. Cependant, la femme sentit que son bel amour se retenait, intriguée, elle recula son visage du sien, pour voir ce qui pouvait bien expliquer cette "accalmie" :

- Il semblerait que je doive revenir vers le Roi d'Argent...

Livia sourit en entendant le "je doive". Elle ne pensait pas que cela serait une obligation. Isley n'avait jamais exigé de Rigald la moindre obéissance. C'est le numéro deux qui lui avait offerte sur un plateau. Du moins, était-ce les paroles d'Isley lorsqu'ils avaient évoqué l'ancien numéro 2.

- Mais sincèrement, t'accompagner me tenterais bien. Mais soit. Profite de ce que j'espère être ta dernière mission en solo alors...

- Profiter mon amour? Fit la jeune femme avec un sourire à la fois moqueur et perplexe.

- Parce que je ne compte pas te laisser de nouveau.

- promis.

- Bon, la je n'ai pas trop le choix, mais...

- mais?

- je vais en profiter pour revoir Isley je suppose...

- oui... vous avez du temps a rattraper aussi.

- cela fait combien? quinze ans?

Livia haussa les épaules tandis que Rigald plongeait son visage dans la masse de ses long cheveux. Il la serra à nouveau contre lui tandis qu'elle acceptait l'étreinte en lui caressant le dos de manière presque apaisante.

- Strah... Prend garde aux claymores. Elles traquent tous les exaltés. Si nécessaire, n'hésite pas à fuir, d'accord?

- Allons, allons... je ne suis pas n'importe qui non plus... lâcha la fin sur le ton de la plaisanterie. Cependant, son compagnon ne le voyait pas ainsi du tout.

- ta vie est la chose la plus précieuse qui soit....et morte, tu ne servirais pas Isley. Sans compter que je ne suis point sûr de survivre une deuxième fois à ta perte...J'ai de plus en plus envie de t'accompagner quand même. Mais bon... c'est ton choix. Tu es libre, ne l'oublie jamais.

La femme rit en entendant la dernière partie du discours de Rigald.

- eh bien! Toutes ces années t'ont rendu philosophe dis-moi!

Livia rit de plus belle en pensant au jour où il l'avait poussé délibérément et sans lui laisser le choix dans l'éveil. Il lui avait dit qu'il voulait qu'elle soit plus forte et que c'était là, la seule solution possible. Ce jour-là, le Rigald de cette époque ne lui aurait jamais dit cela. Du moins, est-ce qu'elle pensa en riant. Gentiment mais sûrement, la femme redevint sérieuse et caressa le visage de son partenaire :

- pars avec moi à Strah. À nous deux, nous serons invincibles et nous percerons à jour les intrigues de ces satanés humains. Quelques agents de l'Organisation y auraient une certaines influences et donc, travailleraient toujours pour Rimuto et sa clique. Ils sont terrés quelque part et font certainement semblant d'être mort, ils faut les trouver rapidement, les localiser, même si ce n'est pas pour les attaquer immédiatement... il faut juste les évaluer pour savoir quoi en faire et quand le faire.

La furtivement glissa délicatement son visage dans le creux du cou de son amant et le mordit avec vigueur, commençait à le suçoter sans complaisance, pour laisser sa marque dans sa chair. Elle se recula lentement, laissant son souffle caresser la peau et la trace du suçon, puis planta son regard dans celui de son amant.

- Et si tu me prenais là, maintenant, tout de suite? Je veux te sentir en moi, aller et venir, me posséder... Livia embrassa Rigald à nouveau avec force et sensualité avant de lui dire du bout des lèvres : je suis à toi mon seigneur et maître, mon amour, mon Roi.. en même temps qu'elle lui disait cela, la femme commençait à se dévêtir, doucement.

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Un haussement d'épaule. Une réaction simple et révélateur, voila donc la réponse de la jeune femme à son commentaire? d'un côté, cela l'agaçait, mais de l'autre, il pouvait comprendre gâcher un peu la romantique situation avec ce que l'on pourrait qualifier dans le cas présent de babioles. En effet, loin de le repousser, elle réagissait même plutôt bien (voir même TRES bien) ses marques d'affections (bon. refuser n'aurait pas été une idée convenable. mais la réponse c’est bien).
Par contre, il entendit dans sa réponse une légère teinte de sarcasme. Elle se moquait de lui -gentiment il s'en doutait-, et il fallut un certains temps à l'éveillé pour en comprendre les raisons. Il était vrai, réflexion faite, que tout ce qui s'était passé autrefois furent un peu contre l'opinion de la demoiselle: entre son éveil, sa rencontre avec Riful, celle avec Isley... au final, à présent qu'il y réfléchissait, que même pour leur relation il s'était imposé. le choc qu'elle lui avait fait, sa proximité avec Milena l'avait tout de suite conquis. Et on ne pouvait pas dire que la pauvre claymore, à l'époque, n'avait eu le choix...

La suite le fit cependant légèrement ricaner, toutefois comme un individu pouvait ricaner quand on se fait mordiller le cou... ou mordre? même sous forme humaine, il était solide, mais là il eut une légère pointe de souffrance dans le plaisir, Une belle marque violette devrait apparaître pendant un temps sur son cou, mmmh... bien que submergé par d'agréables sensations, l'ancien numéro deux ne put s'empêcher de penser que, s'il allait voir Isley ainsi, celui-ci réagirait sans doute avec amusement en voyant la marque.
Et sans doute avec curiosité au fait qu'il ne soit pas avec Livia malgré tout. Ou sinon, de drôles d'idée passeraient dans sa tête... après tout, avait-il déja songé à la trahison de Rigald. L'abandon, le Roi Lion aux Yeux d'Argent pourrait peut-être y songer. Mais la trahison, non. C'était sans nul doute la seule chose qui ne l'ai jamais fait se sentir vivant. Bon, avec le sang et la mort certes. Et Livia bien sûr, mais sa compagne appartenait à une catégorie très particulière.

Quand elle se sépara de lui, ce fut une douleur presque physique. Toutefois, il put ainsi répondre au commentaire de la demoiselle.

Arrête de jouer... tu sais très bien que je ne demande que cela. C'est ta mission, seul ton désir compte. Le mien, tu ne le connais que trop bien...

Et ce malgré le fait que la jeune femme lui ait dit tantôt qu'ils devraient se séparer et qu'il rejoigne Isley. Rigald aurait beau être loyal au Roi, l'amour qui le liait à la jeune femme le liait à elle avec la puissance d'un étau. C'en était presque terrifiant. Mais c'était ce qui l'avait amené à copuler malgré Riful (un événement qu'il gardera encore longtemps en mémoire) et à quitter le nord. Qu'elle dise que son seigneur et lui aient du temps à rattraper, c'était un fait. Mais il avait déjà du temps à rattraper avec elle.
Cela dit, il songea que la tête d'Isley quand il le reverra pourrait se révéler des plus comiques, le Roi Lion était officiellement "mort". Comme lui en fait. Il était extrêmement curieux de voir sa réaction, surtout que, étant prévenu, il songerait à camoufler son yoki. Ce détail était l'unique chose ayant permit à Livia de le retrouver, sans nul doute. Autant ne pas brouiller la surprise. Et il était curieux de constater s'il décèlerait du regret ou du plaisir dans les yeux du Roi d'Argent.

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