Une Claymore de passage [Désert]

Lila soupira. maintenant elle en était sure, on la suivait et on voulait même venir à sa rencontre. Quel dommage, elle aurait bien rêvasser encore un peu, maudissant le désert, les Eveillées et à peu près tout ce qui lui venait à l'esprit. Non, à présent elle allait devoir supporter une petite Claymore qui allait probablement lui poser des questions et la retarder. Enfin! pour le moment elle n'avait pas de missions en cours. Elle expliquerait à l'homme en noir qui viendrait s'enquérir des raisons d'un tel retard qu'une gamine était venue tailler le bout de gras en plein désert...

Du bruit lui parvint de son côté droit. Par réflexe elle se tourna en ce sens d'où venait d'ailleurs l'aura faible. Ce qui était étrange, c'était que le sable amortissait presque totalement les sons, or si Lila parvenait quand même à percevoir les bruits de pas de la Claymore c'était vraiment que celle-ci avait des notions en discrétion proches du néant. Se faire pister dans des dunes, était quelque chose de terrible, et un bon assassin, pouvait sans effort surprendre même une Claymore dans ces lieux. Mais celle-ci, ne semblait pas assez intelligente pour se montrer discrète. Lila haussa dédaigneusement les épaules et s'éloigna de son pas désinvolte. Quand soudain.

Lila se sentit projeté en avant. Sa rapidité lui permit de se rétablir avant de s'effondrer dans le sol, et la Claymore s'immobilisa à quelques pas, épée au clair, les yeux rivés sur un nuage de sable. Lorsqu'enfin la poussière soulevée s'estompa, une jolie jeune fille se releva. Elle épousseta maladroitement ses vêtements avant d'éclater de rire. Lila laissa retomber son bras, consternée. Qui était cette hurluberlue ?

Je suis Ailyth, numéro 30 de l’organisation et tu est sur ma zone. Qui es-tu ?

Oh, ceci explique cela! La numéro 30! Ailyth, apparemment. Cela avait du changer récemment, elle avait l'impression d'avoir déjà rencontrer la 30 par le passé. mais peut-être pas, finalement, elle n'en était pas certaine. Lila avait toujours eu mauvaise mémoire et ne l'utilisait qu'en cas de besoin urgent. Pour se souvenir des missions généralement, ou des noms des ses quelques amies ou des cinq premières Claymores. mais se rappeler des 47 abruties. Non, c'était trop! Leurs auras étaient tous trop différents! C'était pénible.

Lila finit par ranger son arme dans son dos et expliqua de sa voix calme:

Lila, la numéro 6. Jolie zone.

Murmura ironiquement la jeune femme. Cette donzelle ne devait pas avoir trop de villageois à sauver! C'était mieux que des vacances ici!

Lila sentit l'aura de sa soeur d'arme se troubler alors qu'elle avait déjà rangé sa lame. Qui était cette gamine ? Comment une trouillarde pareille avait-elle pu survivre jusqu'à l'âge adulte et surtout être numéro 30 comme elle venait de l'affirmer. Malgré ses doutes, Lila acquiesça tranquillement d'un mouvement de tête. Après tout, l'autre n'avait aucun intérêt à lui mentir, à moins que ce fut une Claymore exilée ? Ah quelle histoire ces guerrières Claymores qui claquaient la porte, furieuses ou contrariées d'avoir été bernées ou forcées à tuer une ancienne amie. Lila était lasse de cette fillette qui découvraient la dureté de la guerre avec un étonnement idiot.

Si elles avaient été plus intelligentes, si elles avaient réfléchi dès le départ, la chute aurait été moins longue et elles ne tenteraient pas de survivre avec trois cailloux dans la forêt. Elles seraient encore dans l'armée des Claymores ou tout simplement déjà mortes. Elles se seraient suicidées avec le peu d'honneur et de bon sens qui leur restaient. Et n'attendraient pas comme maintenant qu'une Claymore de l'organisation viennent les achever. Et d'ailleurs, pourquoi l'organisation ne faisait-elle rien pour le liquider une bonne fois pour toute ? Cette femme enceinte, comment ce faisait-il qu'elle soit encore en vie et dans la nature. Pitoyable!

Cela mettait Lila hors d'elle... enfin cela l'agaçait un peu. Mais ce n'était pas son problème. Elle ne disposait que d'une dizaine d'années à vivre, elle ne verrait pas l'enfant devenir l'ennemi de l'organisation.

Que viens-tu faire ici ? Tu es pressée ? Ca te dit de venir un peu avec moi ? On est à quelques heures d’une petite oasis où je me repose en général.

Et si elle l'assommait, se tairait-elle ou continuerait-elle à débiter un flot continu de paroles inutiles ? Si Lila était la Claymore la plus rapide, l'autre possédait la faculté du langage la plus insupportable de toute l'île! Peut-être que certains yoma succomberaient à de telles attaques. La jeune femme soupira et murmura, sa bouche un peu patteuse de ne pas avoir tenue de conversation depuis lontemps.

Je t'accompagne. Je suis fatiguée.

Dit succinctement la femme. Elle regarda au loin. Des dunes à perte de vue. Impossible de trouver un improbable oasis ici. Impossible.

Je traverse ton territoire pour retrouver le mien. C'est tout.

Expliqua Lila. Ailyth ferait mieux de se mêler de ses affaires. La jeune Claymore n'aimaient pas les curieuses et les bavardes. Si elle échangeait, c'était avec une certaine réticence.

Avec un certain ennui, la Claymore vit qu'Ailyth était prête à se confier à elle. Cette petite bouche fine désormais entrouverte débitait un flot de paroles idiotes et inintéressantes. Mais la numéro six se força à les écouter, car après tout n'essayait-elle pas de faire des efforts? Ah! Cela lui donnait envie de rire! Au point où elle en était, faire marche arrière ne servirait à rien. Et alors que les ténèbres s'épaississaient autour des deux guerrières et que le crépitement du feu se faisait toujours plus sinistre, Lila dévisageait Ailyth, tentant de comprendre pourquoi elle offrait un visage aussi mélancolique. Malheureusement, elle commençait à craindre qu'une telle entreprise ne soit vouée à l'échec.

Un petit homme en tenue rouge, juché sur l'épaule gauche de Lila lui susurra d'utiliser sa légendaire technique de vitesse pour échapper à cette dissertation sentimentale. Des remords, il en pleuvait sur la tête de cette pauvre chose contrairement Lila qui n'en ressentirait pas le moindre. Mais elle résista.

Je ne suis pas très hautement classée donc tu ne dois pas avoir entendu parler de moi. On m’appelle la Fuyarde et, en général, celles qui ont fait équipe avec moi ne veulent plus jamais me revoir.

Certainement. D'ailleurs, celles qui l'avaient rencontrée tout court ne devaient pas avoir vraiment envie de la retrouver autour d'un autre feu de camps. Et son niveau n'avait rien à voir là dedans. Cynique, Lila ne sourit pourtant pas à ses propres pensées. Ce n'était pas dans le but d'être désagréable ou narquoise vis à vis d'Ailtyh, c'était juste un constat dénué d'empathie. Finalement, il était plutôt navrant pour cette demoiselle de se confier à une personne aussi froide et indifférente que Lila. Tout ce qu'elle pouvait espérer recevoir en échange de ses aveux n'était qu'un vague sentiment vaporeux et imprécis tinté de sarcasmes informulés.

Outre ma frousse du combat, qui est débile pour une offensive, j’en ai tellement bavé avant et depuis ma transformation que je me pose beaucoup de questions, voir trop de questions. C’est pour cela qu’ils m’ont envoyé dans ce coin perdu, que je ne casse pas trop les pieds au monde.

Trop de questions ? Oh alors elles faisaient partie de ces idiotes qui soupçonnaient l'Organisation de ses servir des guerrières demi-démones sans aucune considération. HAHAHA! C'était pitoyable! Comment ne s'en était-elle pas rendue compte plus tôt? Quelque soit le but poursuit par l'Organisation, complot, expériences sordides, ou altruisme envers le humains, les guerrières n'avaient toujours été que de pauvres pionnes. Des pionnes consentantes qui avaient pour la plupart accepté de suivre les hommes en noir avec reconnaissance. Qu'espérait ces pauvres filles? Qu'on les rassure sur leurs avenir ? Cela faisait des siècles que les Claymores servaient béatement les ordres qu'un sinistre personnage leur confiait, pourquoi serait-ce pour elle que cela changerait ?

Et toi, est-ce que tu veux parler de quelque chose ?

Lila leva les yeux vers Ailyth. Deux morceaux de métal brillant, terrifiants et sans âme humaine. Finalement, Lila baissa la tête et regarda le feu. Qu'avait-elle à dire ? Rien. Sa vie n'était que combats à répétitions. Les gens qu'elle rencontrait n'étaient que d'insignifiants intrus dans son existence monotone. Ils ne modifiaient en rien son petit monde, la laissant toujours égale à elle-même. Sauf peut-être...

Non je n'ai rien à dire. Mais je te conseille tout de même d'être prête à recevoir un message de l'Organisation dans les mois à venir. Ils décideront de nous faire intervenir bientôt. Je pense. Bonne nuit.

Lila se leva, grande et fine. Elle toisa de haut ce yoki dérisoire puis finit par s'éloigner un peu et s'adossa à l'un des arbres.